LES ENCÉPHALOPATHIES ÉPILEPTIQUES DUES À LA MUTATION DU GÈNE KCNT1

Le gène KCNT1 contrôle la production dans le système nerveux d’un canal ionique perméable aux ions potassium, un facteur clé dans la transmission de l’information le long des neurones.

Les mutations de ce gène conduisent à des formes d’épilepsie particulièrement graves touchant des nourrissons et de jeunes enfants, épilepsies qui sont résistantes aux traitements et sans recours thérapeutique. Il s’agit de pathologies très rares, touchant moins d’un enfant sur un million, sans distinction de sexe.

Les mutations de KCNT1 sont essentiellement à l’origine de deux types d’épilepsies, l’Epilepsie Partielle Migrante (en anglais Epilepsy of Infancy with Migrating Focal Seizures, EIMFS) et l’Epilepsie du Lobe Frontal Nocturne Autosomique Dominante (en anglais Autosomal Dominant Nocturnal Frontal Lobe Epilepsy, ADNFLE).

L’Epilepsie Partielle Migrante apparait dans les six premiers mois de vie de l’enfant.

Les enfants atteints peuvent subir plusieurs crises convulsives par jour, crises qui peuvent devenir quasi-ininterrompues à partir de l’âge de six à neuf mois. Ces crises sont associées à de graves troubles du développement cérébral, un retard cognitif sévère, de nombreux enfants ne pouvant acquérir ni la marche ni le langage.

Les enfants présentent de nombreuses autres manifestations, cyanose (bleuissement de la peau), ou encore apnée. La mortalité associée à la pathologie est élevée, estimée entre 17% et 33%.

L’Epilepsie du Lobe Frontal Nocturne Autosomique Dominante est d’apparition plus tardive, à l’enfance l’adolescence ou l’âge adulte, et se traduit par des crises

qui peuvent aller d’un simple éveil jusqu’à des convulsions généralisées avec des mouvements brusques et des manifestations toniques. Ce type d’épilepsie, quand elle est due à des mutations du gène KCNT1, est associé avec un âge d’apparition précoce, et à des problèmes psychiatriques, cognitif et de comportement.

Les épilepsies dues à des mutations dans KCNT1 sont réfractaires aux traitements anti-convulsifs traditionnels. Si un petit nombre d’individus répondent à la quinidine utilisée hors de son indication traditionnelle, ces épilepsies sont de manière générale insensibles à tout type de traitement.

Aujourd’hui, l’urgence de la situation pour sauver ces enfants nous incite à aborder la recherche sous 3 axes prioritaires:

 1- La thérapie génique, sticto sensu :

La thérapie génique consiste à introduire du matériel génétique dans des cellules pour soigner une maladie. Au départ, cette approche a été conçue pour suppléer un gène défectueux en cas de maladie monogénique (i.e. liée à la dysfonction d’un seul gène). Mais au cours des deux dernières décennies, l’évolution rapide des connaissances et des technologies a permis de démultiplier les stratégies possibles et d’élargir leur utilisation à de très nombreuses indications.

La mise au point d’un programme de thérapie génique à proprement parlé est longue et coûteuse ( plusieurs millions d’euros ) mais doit être envisagée dès aujourd’hui afin de pouvoir proposer une réponse thérapeutique pérenne aux futurs enfants atteints par la mutation du gène KCNT1.

2 – La thérapie antisens ( ASO ) :

C’est une forme de traitement contre les maladies génétiques et les infections. Quand un gène particulier est connu comme responsable d’une maladie particulière, il est possible de synthétiser un brin d’acide nucléique (ADN, ARN, ou un analogue chimique) complémentaire, destiné à se fixer à l’ARN messager (ARNm) du gène lors de son expression. Cela a pour conséquence d’inactiver le gène ou de modifier la protéine correspondante.

Outre atlantique, plusieurs équipes travaillent sur le développement de médicament oligonucléotidique antisens pour supprimer la mutation de novo sur le gène KCNT1.

Cette forme de thérapie donne aux personnes touchées la chance de se développer comme les autres enfants, et la neurogénétique aux Etats-Unis est prête pour agir, mais cela représente un coût important de 1,7 M d’€ par patient, plusieurs enfants étant éligibles.

Un transfert de technologie entre les USA et l’Europe, et plus particulièrement avec la France est à l’horizon, mais nécessite en amont, la création d’un registre de malades atteints par la mutation du gène KCNT1.

La mise en place rapide de ce registre actualisé à travers la France et l’Europe est une priorité et représente un coût d’une centaine de milliers d’euros.

3 – Le repositionnement de molécules :

Il s’agit de la recherche de molécules déjà approuvées chez l’homme ( bénéficiant déjà de l’AMM ) afin de venir endiguer les effets de la mutation génétique. C’est le cas par exemple de la Quinidine ( molécule initialement utilisée chez des patients présentant des cardiopathies ) qui présente un effet bénéfique chez certains enfants KCNT1.

Des biotech françaises sont spécialisées dans la découverte et le repositionnement de médicaments dans le domaine des maladies monogéniques rares, et leur technologie permet de mener des projets de recherche individualisée et d’identifier, en quelques mois, de nouveaux candidats médicament en collaboration avec les associations de patients, les médecins et les partenaires académiques et industriels.

Ces projets représentent un coût d’environ 150.000 à 200.000 € par an.